KILIMANDJARO, Leçons d’une ascension magique !

L’ascension du Kilimandjaro, communément appelé le « Toit de l’Afrique », dominant les nuages, a tout simplement dépassé mes attentes… Elle fut l’occasion non seulement de découvrir des panoramas extraordinaires d’une beauté presque irréelle, mais aussi de vivre une formidable aventure humaine et sportive qui tient du parcours initiatique.

Départ le 17 août pour une semaine d’ascension avec mes quatre amis Luc, Jean-Luc, Stéphanie et Mayke ; nous avons atteint le sommet une semaine plus tard à l’issue d’un parcours sans difficulté technique particulière (une bonne condition physique suffit généralement même si le taux de réussite moyen est estimé à 55%) mais nous réservant une ascension finale de nuit qui représente le véritable défi de l’aventure… 14 heures de marche (montée puis descente) qui vont nous obliger à puiser dans nos ultimes réserves d’énergie pour gérer le froid, la fatigue et l’altitude…

D’abord une école d’humilité

Lorsqu’en réponse à notre question du premier jour, notre guide nous précise modestement qu’il réalise en moyenne trois ascensions de Kibo (sommet du Kilimandjaro) par mois, cela remet vite les choses en place concernant la dimension exceptionnelle de l’exercice… Qui plus est, le défilé des porteurs aux corps menus, mal vêtus, mal chaussés et chargés d’énormes paquetages en équilibre sur leur tête ou leur nuque, nous dépassant constamment pour préparer le camp avant notre arrivée, nous laisse pensifs… L’exploit, c’est celui de ces héros du quotidien, aux chants joyeux et heureux de leur sort ! C’est la première leçon que nous a enseignée le Kili et elle est de taille ! Cette montagne, c’est leur gagne-pain, leur bureau à eux et ils n’affichent que rarement un signe de fatigue, ils prennent sur eux, nous remerciant de leur donner du travail… Ils ont aussi plaisir à nous faire plaisir. Quelle exemplarité ! Comment rester insensibles à une telle attitude ?

« Polé-Polé », l’art du « Rythme juste »

J’ai dû entendre l’expression « Polé-Polé », « doucement » en swahili, des dizaines de fois tout au long de l’ascension. Les guides comme les porteurs ne cessent en effet de nous rappeler à travers cette formule douce à l’oreille que si nous voulons arriver jusqu’au sommet (et ils tiennent à ce que nous y arrivions !), il est important d’y aller « polé-polé ». Un rythme, mais aussi une façon d’être et de vivre pour eux qui relativisent tout avec une aisance déconcertante, sans pour autant perdre le contrôle. Ils « gèrent », tout simplement…

Pendant cette semaine extraordinaire, je me suis laissé imprégner par ce rythme lent, presque lancinant, toujours régulier. C’est en particulier ce « pas du guide », imprimé par notre corps et notre cerveau, qui nous a permis d’atteindre Uhuru Peak, le sommet situé à 5.895m, sans céder aux effets du froid, de la fatigue, ni au mal des montagnes. Ne pas le respecter et avancer « araka-araka » (« rapidement » en swahili) peut mettre en péril les chances de parvenir tout en haut, et certains sportifs de haut niveau au cardio impeccable en font régulièrement les frais au moment de la fameuse ascension finale…

J’y ai vu pour ma part un enseignement d’une force incroyable, une forme d’intelligence, de sagesse transférable à tous les domaines de l’existence ; un art de la maîtrise de soi, de la modération, de la constance, du rythme juste qui nous fait aller mieux, plus loin, plus haut et nous prévient contre les dangers de la précipitation, de la fébrilité, du court terme, de la compétition aussi… D’ailleurs, on finit par oublier jusqu’au temps lui-même et le cœur s’apaise… Quand le rythme est juste et permet une respiration régulière, les chances de réussite augmentent et la conscience est tranquille.

Au fond, l’essentiel dans toute ascension n’est-il pas d’arriver au sommet, quel que soit le temps que cela nécessite ? Et de manière presque ironique, ce temps se révèle souvent optimal quand le rythme est juste. La lenteur est une notion relative…

La puissance du collectif

La réussite du projet est faite d’un tout et résulte d’une alchimie particulière. Le rôle du guide est de nous accompagner jusqu’au sommet et son expérience comme son attitude tout au long de l’aventure sont déterminantes ; un mélange de proximité, de vigilance et de professionnalisme. Les guides adjoints, le cuisinier, les porteurs jouent un rôle tout aussi crucial, chacun apportant sa contribution indispensable pour que les conditions physiques, psychologiques et matérielles soient réunies. Qu’un seul élément essentiel fasse défaut et cela peut mettre en péril la réussite du projet, surtout lorsqu’on se trouve dans un environnement extrême comme la montagne. L’anticipation se révèle une alliée incontournable, l’esprit responsable, positif et solidaire de chacun aussi !

C’est également le cas pour ce qui concerne l’équipe que nous formons avec mes quatre compères. La cohésion et la bonne humeur de notre groupe, l’homogénéité de notre condition physique, notre détermination forte et partagée, notre joie de vivre ensemble cette belle aventure sont autant d’éléments qui nous ont permis d’aller jusqu’au bout malgré le froid, la fatigue, l’inconfort, le manque d’oxygène. Cette aventure est d’abord celle d’une équipe qui s’est fait plaisir, s’est serrée les coudes et s’est dirigée un pas après l’autre dans la même direction représentant un défi stimulant. J’en profite ici pour remercier chacun d’eux 🙂

 

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